Voilà un article bien particulier que je sors ici. D’abord une courte réflexion puis l’interview d’une femme que je suis depuis des années et dont j’admire la beauté (intérieure comme extérieure), Héloïse Weiner qui a bien voulu répondre à mes quelques questions.
Derrière un écran, c’est plutôt safe, on ne risque pas grand chose, on se sent en sécurité pour exprimer ce qui nous passe par la tête. Tout ce qu’on ne dirait pas dans la réalité par convenances, tout ce qu’on ne dirait pas si nous me manquions pas d’estime et de confiance en soi, tout ce qu’on ne dirait pas si nous ne cherchions pas à prouver notre valeur que l’on voit si déficiente.
On extériorise pour sortir toutes sortes d’émotions qui nous traversent. Les émotions de joie, de plaisir, de surprise, mais aussi les autres émotions, un peu plus désagréables, celles qui montrent qu’on cherche à rabaisser la valeur de l’autre pour sentir la notre pas si basse que ça.
« je vais te dire quelque chose de dégradant pour me prouver à moi même que tu n’es pas aussi bien que j’en ai l’impression et ainsi me prouver, par la même occasion, que je ne suis pas si nul.le que j’en ai l’impression ». C’est ça qui se joue derrière les critiques, les mots durs, les pics, les attaques.
Les réseaux sociaux, c’est aussi l’expression de pensées agréables, celles qu’on ne dirait pas par convenances également, celles qu’on ne dirait pas si nous n’avions pas peur de ressentir une dévalorisation en valorisant l’autre. On se permet de dire des mots doux, beaucoup plus que de visu.
Les réseaux sociaux c’est un peu le lieu où tout est désinhibé, tout ce qu’on ressent et qu’on se permet d’exprimer derrière un écran qui nous protège. Mais la personne qui reçoit les messages, elle, n’est protégée par rien, les mots lui parviennent, incisifs et limpides tels qu’ils sont écrits. Les mots ont un impact, ils peuvent être du poison ou de l’amour selon ceux que l’on choisi. Et je ne peux pas ne pas citer le livre de Don Miguel Ruiz, avec l’accord toltèque : « que ta parole soit impeccable »
« La parole est votre outil le plus puissant en tant qu’être humain; c’est un instrument magique. Mais comme une lame à double tranchant, votre parole peut créer les rêves les plus beaux ou tout détruire autour de vous »
Je finirai par remettre en avant la cause de nos paroles parfois blessantes, cette recherche de valorisation par la dévalorisation des autres. Travaille sur la valeur que tu as de toi, retrouve l’estime qui te manque et tes paroles s’aligneront.
Je fais place maintenant à l’interview d’Héloïse :
-Héloïse, beaucoup te connaissent comme l’illustratrice de ton ancien blog « It’s a mum’s life », mais tu es tant d’autres choses, que dirais tu pour te présenter ?
-Je suis une jeune femme de 28 ans, maman de 5 enfants qui ne vont pas à l’école. J’adore les livres, les couleurs, les quenelles, les gâteaux, les blagues pourries de mon mari, et les jeux de société.
-Depuis combien de temps toi et ta famille êtes sur les réseaux sociaux ?
-J’ai commencé à partager mes dessins sur les réseaux sociaux il y a cinq ans, puis des articles de blog et des photos de notre famille il y a trois ans environ.
-Quelles sont tes motivations, les raisons de ce choix ?
-Au début, c’était principalement l’envie de partager notre mode de vie un peu alternatif. Peut-être pour montrer que c’est possible, pour encourager ceux qui aimeraient sauter le pas mais n’osent pas.
-Quelles sont les aspects positifs et négatifs que cela t’apporte ?
-C’est agréable d’avoir une communauté qui soutient (ou au moins respecte) nos choix de vie. Là où on est loin de notre famille (parce qu’expatriés en Angleterre alors qu’ils vivent majoritairement en France), on se sent moins seuls grâce à l’interaction avec ceux qui suivent notre quotidien. Ça m’a aussi apporté beaucoup de clients pour mes livres et illustrations. C’est grâce aux réseaux sociaux que j’ai pu faire connaître mon travail.
L’aspect négatif c’est clairement les commentaires jugeants, mesquins, ou carrément méchants.
-Lorsqu’on commence à avoir une certaine notoriété, on se confronte d’avantage aux interactions avec les followers, leurs émois, leurs réflexions, leurs jugements positifs comme négatifs. Sais-tu combien de messages, en moyenne, tu reçois par jour ?
-Ca dépend des jours, mais je dirais au minimum une petite centaine, et au maximum… plusieurs milliers ! (ça m’est arrivé par exemple après la naissance d’Iris) Mais c’est plus rare… J’estime en moyenne recevoir entre 200 et 300 messages par jour (sans en être certaine, je n’arrive pas à tout lire)
-Reçois-tu des messages malintentionnés ? Sont-ils nombreux ?
-Oui, mais ils sont heureusement beaucoup moins nombreux que les messages positifs 🙂
-Quels sont les types de messages les plus difficiles à recevoir, les plus contrariants?
-Ce que je déteste, ce sont ceux qui me parlent sur un ton de supériorité, comme s’ils me dénigraient déjà avant même d’avoir appris à me connaître (à l’écrit, je ne supporte pas les questions « innocentes » tournées de façon jugeante, surtout lorsqu’elles sont suivies d’un clin d’oeil ! (Par exemple « Et tu ne crois pas que ça irait mieux si tu jouais avec ta fille au lieu de poster une photo d’elle dans ta story ? 😉 »))
Je reçois aussi parfois des messages de personnes qui me disent se sentir vexées par mes posts, qui me reprochent de ne pas être plus « vanille »… Ca, c’est l’éternel censure à laquelle il est impossible d’échapper. C’est comme parler d’allaitement à une maman qui donne le biberon et qui transformerait « je trouve que l’allaitement c’est top » en « je déteste celles qui donnent du lait artificiel, elles sont toutes nulles ». Si on va dans ce sens, on ne peut plus rien dire. Je n’ai pas envie de devoir me restreindre parce que mes convictions ne correspondent pas à tout le monde (ce qui est évidemment impossible). Je veux continuer à parler librement de l’instruction en famille par exemple, sans que ceux dont les enfants sont scolarisés se sentent jugés, mais sans faire mille détours pour expliquer mes pensées. J’ai pourtant l’impression d’être bienveillante dans mes propos, mais il y a toujours quelqu’un qui le ressent autrement. Ce n’est pas évident.
-Si oui, cela t’a-t-il déjà donné envie d’arrêter les réseaux sociaux ? Cela a-t-il pu avoir un impact sur ta famille ou tes proches ?
-Oui, j’ai souvent eu envie d’arrêter les réseaux sociaux, et je me pose encore régulièrement la question. Pour le moment je trouve que les côtés positifs sont plus importants que les côtés négatifs, donc je choisis de continuer. Mais si ça devenait trop lourd, je n’hésiterais pas à arrêter.
-Parmi ces catégories de messages reçus, peux-tu les classer des plus nombreux au moins nombreux ?
Haineux, malveillants, sympathiques, admiratifs, fanatiques
-Sympathiques, admiratifs, malveillants, fanatiques, haineux
-Comment expliques-tu ces comportements difficiles ?
-Je ne sais pas ! Je n’arrête pas de me dire, « mais si ce que je poste ne plait pas aux gens, ils n’ont qu’à arrêter de me suivre, je ne force personne à rester sur mon compte ! » Pas la peine de venir décharger sa haine… Pour rien, en plus, puisque quand je lis ce genre de message, je prends rarement la peine de répondre : je bloque le compte, et je passe à autre chose !
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